Dans un contexte géopolitique en pleine mutation et à l’heure où l’Europe redéfinit ses priorités énergétiques face aux enjeux climatiques, une alliance stratégique entre la Türkiye, l’Azerbaïdjan, la Bulgarie et la Géorgie s’est formée autour d’un objectif commun : établir un corridor d’électricité verte transfrontalier. Ce partenariat, scellé par un mémorandum d’entente signé en avril 2025, annonce une nouvelle ère dans la coopération énergétique régionale.
Une dynamique régionale tournée vers l’électricité verte
Le mémorandum signé à Istanbul marque une évolution significative dans les relations énergétiques entre les quatre pays. Là où le gaz naturel dominait autrefois les échanges, c’est désormais l’électricité d’origine renouvelable qui est au cœur de l’agenda. Ce projet ambitionne de relier les systèmes électriques de la région grâce à de nouvelles interconnexions, facilitant le transit et le commerce d’électricité verte vers l’Europe.
De la rivalité à la complémentarité : le tournant turco-bulgare
Pendant des décennies, la Türkiye et la Bulgarie ont été concurrentes sur la scène énergétique, en particulier autour du gaz russe. Aujourd’hui, une complémentarité inédite émerge. En s’inscrivant dans le cadre du “Green Electricity Transmission and Trade Project”, ces deux nations transforment leur position géographique stratégique en levier de coopération durable. Ensemble, elles participent activement à l’élaboration d’une infrastructure énergétique propre et connectée à l’Europe.
La Bulgarie : d’un maillon faible à un pivot énergétique
La guerre en Ukraine a mis en lumière la vulnérabilité de la Bulgarie face aux chocs énergétiques. En réponse, Sofia opère un virage stratégique. Le pays investit massivement dans les énergies renouvelables, avec plus de 249 projets en cours, et modernise son réseau électrique via l’initiative “Greenabler”. Résultat : une augmentation notable de sa production et de ses exportations d’électricité. La Bulgarie s’affirme progressivement comme un acteur central de la transition énergétique dans les Balkans.
La Türkiye : entre hub énergétique et ambition verte
Longtemps acteur de transit pour le gaz, la Türkiye accélère sa transition vers l’énergie propre. Avec une capacité solaire ayant dépassé les 21 GW en 2025 et une croissance spectaculaire de l’éolien, le pays devient un fournisseur potentiel d’électricité verte. Le corridor énergétique vert renforce cette ambition : Ankara se positionne comme un point d’ancrage indispensable entre le Caucase, le Moyen-Orient et l’Europe.
L’Azerbaïdjan : diversification et diplomatie énergétique
Riche en hydrocarbures, l’Azerbaïdjan cherche à diversifier son portefeuille énergétique. Le corridor vert offre à Bakou une opportunité stratégique : exporter de l’électricité verte vers l’Europe, notamment via le corridor du Zanguezour. Bien que cette voie rencontre encore des obstacles politiques, son intégration renforcerait le rôle de l’Azerbaïdjan comme partenaire énergétique fiable dans une Europe en quête de décarbonation.
Une coopération énergétique aux enjeux multiples
Ce partenariat quadrilatéral dépasse la simple interconnexion électrique. Il reflète une vision partagée : celle d’une Eurasie durable, intégrée et moins dépendante des énergies fossiles. En mutualisant les investissements, les infrastructures et les savoir-faire, les quatre pays s’engagent non seulement dans une transition énergétique ambitieuse, mais contribuent également à une stabilité régionale accrue, à la résilience économique et à la lutte contre le changement climatique.
Conclusion
Le corridor énergétique vert s’impose comme une initiative phare de la décennie, illustrant la capacité des nations à transcender leurs différends au profit d’un avenir commun. Entre modernisation des réseaux, souveraineté énergétique et diplomatie climatique, ce projet pourrait bien redéfinir l’équilibre énergétique en Europe du Sud-Est et au-delà.