Paris – L’Elysée
Un geste, quelques secondes d’image captées lors d’un sommet officiel, et la machine à fantasmes s’emballe. Depuis samedi, une vidéo montrant Emmanuel Macron, lors d’une réunion avec plusieurs chefs d’État européens, a été détournée et massivement relayée sur les réseaux sociaux, notamment par des membres et sympathisants du parti souverainiste Debout la France, laissant entendre que le président de la République aurait manipulé, en pleine session, un sachet contenant une substance suspecte.
Face à l’emballement numérique, l’Élysée a réagi dès dimanche en publiant un démenti formel, dénonçant « des accusations totalement infondées et grotesques » et expliquant que le président tenait simplement un mouchoir blanc en papier, qu’il a posé sur la table avant de poursuivre ses échanges. Une séquence parfaitement anodine, selon les services de la présidence, capturée hors contexte et instrumentalisée à des fins politiques.
Une rumeur virale et orchestrée sur X
Tout est parti d’un extrait de quelques secondes circulant sur X (anciennement Twitter), où l’on voit Emmanuel Macron, en retrait à une table de réunion, manipuler ce qui ressemble, de manière floue, à un petit objet blanc. À peine publié, le compte officiel du parti Debout la France, dirigé par Nicolas Dupont-Aignan, a repris la vidéo en suggérant, sans preuves, qu’il pourrait s’agir de drogue. Le message, accompagné d’un commentaire sibyllin — « À quoi joue Emmanuel Macron ? » — a généré en quelques heures plusieurs centaines de milliers de vues et relancé des hashtags conspirationnistes.
Plusieurs figures d’extrême droite et de sphères complotistes ont immédiatement amplifié la rumeur, malgré l’absence de toute confirmation ou élément tangible. Certains internautes sont allés jusqu’à affirmer que le président aurait « oublié de couper sa caméra » ou que le geste révélait « son vrai visage ». Des affirmations balayées par les proches du chef de l’État, qui dénoncent « des attaques dégradantes, indignes et caractéristiques des méthodes de l’ultradroite numérique ».
L’Élysée dénonce une tentative de manipulation grossière
Face à la viralité de cette théorie, l’entourage d’Emmanuel Macron n’a pas tardé à réagir. « Il s’agit d’un mouchoir blanc, plié, que le président tenait simplement pour s’essuyer les mains, comme cela lui arrive fréquemment lors de longues réunions où l’on consomme café, eau, jus de fruits. Il l’a posé sur la table, point final », a précisé un conseiller de l’Élysée, joint par nos soins.
Dans un communiqué transmis à plusieurs rédactions, la présidence dénonce une « tentative de manipulation grossière, visant à nourrir un climat de haine et de déstabilisation politique ». L’Élysée accuse même Debout la France d’alimenter sciemment des rumeurs conspirationnistes et de participer à « la confusion informationnelle orchestrée par certains groupuscules d’extrême droite ».
Une stratégie numérique bien rodée
Ce n’est pas la première fois que des rumeurs visant à discréditer la personne d’Emmanuel Macron surgissent des tréfonds des réseaux sociaux. Depuis le mouvement des Gilets jaunes, le président est régulièrement la cible de montages vidéo, détournements de propos ou insinuations personnelles diffusées via X, Telegram ou certains groupes Facebook radicaux. Cette fois encore, la mécanique semble bien huilée : vidéo sortie de son contexte, diffusion massive via des comptes relais, puis récupération par certains élus souverainistes pour en faire un sujet politique.
Du côté des oppositions républicaines, cette campagne de dénigrement suscite gêne et prudence. Si Debout la France a maintenu sa publication sans l’effacer, aucun responsable des Républicains ou du Rassemblement national n’a repris officiellement l’accusation, laissant la polémique se cantonner aux marges les plus radicales du spectre politique.
Un climat politique propice aux rumeurs
Cette affaire s’inscrit dans un contexte où le climat politique français semble plus que jamais friable et sous tension, alimenté par un climat de suspicion généralisée, des réseaux sociaux devenus chambre d’écho des fantasmes les plus absurdes, et une défiance accrue envers les institutions.
L’Élysée, conscient de ces dynamiques, tente désormais de réagir rapidement pour éviter l’installation durable de telles rumeurs dans l’imaginaire collectif, à un an des élections européennes. « Nous devons rester vigilants. Ces manipulations ont un objectif : fracturer encore un peu plus notre démocratie », avertit un proche conseiller du président.