Origine et épopée
Les Turcs ont une histoire unique, s’étendant sur trois continents avec des légendes et des récits héroïques. Originaires des vastes steppes d’Asie Centrale, ces guerriers intrépides ont forgé leur chemin à travers des montagnes embrumées et des prairies étendues, marquant leur présence dans les pierres et les kurgans (tumuli). Leur courage et bravoure face aux ennemis sont légendaires, tout comme leur miséricorde et justice, représentées par les drapeaux flottant au vent. Ce peuple a laissé une empreinte indélébile sur l’histoire mondiale, notamment dans des régions telles que Horasan et l’Anatolie, et jusqu’en Europe, grâce aux sons résonnants des dômes de Boukhara et Tachkent.
Le mot « Turc » provient des termes « Türük » ou « Türi », utilisés par les anciens peuples turciques pour se désigner eux-mêmes. Ces termes signifient « fort » ou « puissant » et apparaissent dans les inscriptions de l’Orkhon, datant du 8e siècle. Les relations avec les Chinois étaient complexes, et les Turcs étaient appelés « Tujue » par ces derniers. Leur robustesse physique et leurs tactiques militaires ont souvent été soulignées dans les récits chinois.
L’alphabet de l’Orkhon, également connu sous le nom d’alphabet göktürk, est l’alphabet originel des Turcs. Aujourd’hui, les Turcs utilisent principalement les alphabets latin, arabe et cyrillique. Le cyrillique, notamment, n’a pas été simplement adopté par les Turcs de la Volga, mais ils en sont à l’origine et les Russes ont utilisé cet alphabet jusqu’à aujourd’hui.
Patrimoine et culture
Les Turcs sont également connus pour leur contribution à la civilisation avec des caravansérails (grandes auberges pour voyageurs et marchands), des madrassas (institutions éducatives islamiques), des hôpitaux, des observatoires et des complexes religieux. Leur civilisation a laissé des pages nouvelles et originales dans la pensée et l’art, marquant l’humanité de leur empreinte. Cette grande civilisation a influencé les cultures de la Chine ancienne, de la Mésopotamie, de l’Iran, de l’Inde, de l’Anatolie, du Moyen-Orient et de l’Europe, comme en témoignent les traces archéologiques trouvées dans ces régions.
Des études révèlent des similitudes frappantes entre le turc ancien et d’autres langues anciennes comme le sumérien (langue de la Mésopotamie ancienne), l’élamite (langue de l’ancien royaume d’Élam) et le hourrite (langue d’un peuple de Mésopotamie du Nord et de l’Anatolie). Des mots similaires et des structures linguistiques communes suggèrent des contacts et des influences culturelles profondes. Par exemple, des mots sumériens comme « dingir » (tengri en turc) montrent des connexions linguistiques étonnantes, confirmant l’ancienne présence des Turcs dans des régions comme le nord de la Mésopotamie et l’Anatolie du Sud-Est.
Période Scythe et premiers développements culturels
Les Scythes, également associés aux peuples iraniens, ont des liens culturels et historiques significatifs avec les groupes turciques. Leur civilisation est connue pour ses œuvres d’art en or, notamment des scènes d’animaux sculptées avec une grande maîtrise. Ces œuvres, trouvées dans diverses collections muséales à travers le monde, témoignent de leur savoir-faire en orfèvrerie et en métallurgie. Les Scythes ont également influencé les cultures avoisinantes par leur mode de vie et leurs traditions.
La période précédant immédiatement celle des Scythes comprend divers environnements culturels et certaines structures étatiques qui sont considérés comme faisant partie de l’époque turque ancienne. Cette période, qui s’étend de la fin du troisième millénaire avant notre ère au début du premier millénaire avant notre ère, est représentée par des environnements culturels tels qu’Afanasevo, Andronovo et Karasuk, englobant le sud de l’Oural, l’Asie centrale et la Sibérie méridionale.
La culture Afanasevo, chronologiquement située entre le milieu du troisième millénaire avant notre ère et le début du deuxième millénaire avant notre ère, fait partie de l’âge du cuivre et de la pierre. C’est une culture d’élevage précoce, développée dans la région de l’Altai et du bassin de Minusinsk. Cette culture, nommée d’après un cimetière situé dans les contreforts de l’Afanasevo, présente des similitudes avec d’autres découvertes de la région.
Les Scythes ou Saka, sont aussi reconnus pour leur art animalier distinctif, un style largement représenté dans leurs objets en or. Les chercheurs ont également noté des influences significatives des Scythes sur les cultures environnantes de l’ancienne Mésopotamie, de l’Iran, de l’Inde et de l’Anatolie. Les pratiques culturelles et les croyances des Scythes ont façonné de nombreuses traditions des peuples nomades qui leur ont succédé.
Alp Er Tunga : héros et symbole
Alp Er Tunga est l’un des souverains scythes les plus célèbres, souvent considéré comme l’ancêtre des dynasties turques. Son épopée, connue sous le nom d’Alp Er Tunga Destanı, est l’un des récits les plus importants de l’histoire culturelle turque. Il est vénéré par les peuples turciques, devenant un symbole de bravoure et d’héroïsme. Les récits de ses exploits ont été préservés dans des œuvres littéraires et historiques, notamment par Kaşgarlı Mahmut. En voici un extrat : « Alp Er Tunga est-il mort ? Malheur à ce monde cruel, le temps a pris sa revanche. Maintenant, le cœur se déchire. Le destin a ses règles. Cela a de nombreuses raisons. Les flèches du destin touchent le monde. Les sommets des montagnes sont coupés. Les héros sanglotent comme des loups. Ils déchirent leurs vêtements. Les lamentations font écho. Les larmes coulent, les yeux se dessèchent. «
Les Kurgans : structures funéraires des Turcs anciens
Les kurgans, qui étaient des structures funéraires en forme de tumulus, sont des éléments architecturaux significatifs dans les traditions turques jusqu’à la fin du Moyen Âge. La construction de ces tumulus consistait à empiler de la terre ou des pierres sur une chambre funéraire. Selon l’importance du défunt, le tumulus pouvait être très haut ou modeste. Des pierres étaient souvent disposées en cercle ou en carré autour du tumulus pour empêcher l’érosion de la terre. Hérodote, historien grec, nous informe que les rois scythes étaient enterrés dans de grands tumulus construits par des compétitions entre les sujets pour créer le monticule le plus élevé.
Ensuite, les Scythes honoraient grandement leurs ancêtres et leurs pratiques funéraires. Darius Ier, roi de Perse, voulait combattre les Scythes, mais ces derniers lui envoyèrent un message : »Trouvez et profanez les tombes de nos ancêtres, alors vous verrez si nous nous battons pour notre honneur. » Les fouilles archéologiques dans les kurgans ont révélé de nombreux objets en cuivre, des armes, des meubles, des bijoux, et des textiles, souvent placés comme offrandes pour le défunt, indiquant une croyance en une vie après la mort.
Par ailleurs, les objets trouvés dans les kurgans, en particulier ceux liés à l’équitation, témoignent de l’importance des chevaux dans la culture des anciens Turcs. Le cheval était non seulement pour les déplacements et la guerre, mais aussi pour l’économie. Les chevaux, domestiqués pour la première fois par les peuples des steppes, ont permis aux anciens Turcs de conquérir de vastes territoires. Mahmoud de Kashgar, éminent linguiste et historien, a déclaré que « le cheval est l’aile du Turc ».
Ainsi, les kurgans reflètent non seulement les pratiques funéraires mais aussi les valeurs culturelles des anciens Turcs, notamment leur vénération des ancêtres et l’importance accordée aux chevaux dans leur société.