C’est un chiffre qui résonne comme une alarme sourde dans le vacarme contemporain. Pour la première fois depuis dix ans, moins d’un Français sur deux lit chaque jour ou presque, selon une étude récente du Centre national du livre (CNL), révélée en avril par Le Figaro. La pratique, jadis naturelle, s’érode. Les écrans omniprésents, les sollicitations numériques incessantes, l’urgence devenue norme : tout semble conspirer contre le temps long et la lenteur féconde qu’exige un livre.
L’enjeu dépasse la statistique. Lire, c’est ménager un espace de retrait, un territoire de silence et de densité intérieure. Le poète Emmanuel Godo le formule avec une gravité éclairante : « Nous n’avons pas de tâche plus urgente, face aux morsures du contemporain, que de ménager en nous un espace de retrait, respirable, silencieux, recueilli. » On ne saurait mieux dire.
La crise de la lecture n’est pas seulement un indicateur culturel : elle est une blessure intime infligée à la pensée. Elle interroge notre rapport au monde, à l’histoire, aux autres et à nous-mêmes. Car renoncer aux livres, c’est se priver d’un dialogue millénaire, c’est consentir à l’amnésie douce que nous impose l’actualité en continu.
Il nous revient, à chacun, de résister à l’ivresse des sirènes numériques. Redécouvrir, dans le froissement d’une page tournée, non pas une nostalgie, mais une respiration. Sauver la lecture, c’est peut-être, dans un monde saturé, sauver la possibilité d’habiter encore le silence et l’esprit.
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