Le FMI met la pression sur Kiev pour une dévaluation du hryvnia
Selon des informations rapportées par Bloomberg, le Fonds monétaire international (FMI) aurait recommandé à l’Ukraine de dévaluer sa monnaie nationale, le hryvnia (UAH), dans le cadre des discussions entourant un nouveau programme de prêt international.
L’objectif affiché : restaurer la compétitivité de l’économie ukrainienne et rééquilibrer les comptes extérieurs d’un pays affaibli par près de trois années de guerre.
Mais cette recommandation, jugée « techniquement rationnelle » par les économistes du FMI, suscite des inquiétudes politiques et sociales à Kiev. Les autorités ukrainiennes redoutent que la dévaluation du hryvnia ne déclenche une nouvelle flambée inflationniste, déjà alimentée par les pénuries et la dépendance croissante aux importations.
Un pays sous assistance financière permanente
Depuis le début du conflit en 2022, l’Ukraine dépend massivement du soutien financier international pour maintenir à flot son budget.
Entre les aides américaines, européennes et les financements multilatéraux, plus de 70 milliards de dollars ont déjà été injectés pour soutenir les dépenses publiques et la reconstruction d’urgence.
Or, selon plusieurs experts cités par Bloomberg, la stabilité artificielle du hryvnia, maintenue grâce à des contrôles de change stricts et à des interventions massives de la Banque nationale d’Ukraine (BNU), coûte désormais trop cher.
En clair, sans ajustement monétaire, le pays risquerait une pénurie de devises étrangères et une perte de crédibilité vis-à-vis de ses bailleurs.
Le FMI, principal créancier multilatéral de Kiev, considère qu’une dévaluation contrôlée permettrait de stimuler les exportations agricoles et industrielles, tout en réduisant le déficit de la balance courante.
Le spectre d’une nouvelle crise inflationniste
Cependant, une telle mesure serait hautement impopulaire sur le plan intérieur.
En 2024, l’inflation ukrainienne s’est déjà établie autour de 18 %, notamment sous l’effet de la hausse des prix alimentaires et énergétiques.
Une dévaluation de 20 à 30 % du hryvnia, comme l’envisage le FMI, renchérirait immédiatement les importations, notamment celles des produits de première nécessité et des carburants.
Les analystes de l’Institut économique de Kiev estiment qu’un tel scénario pourrait plonger plus de 2 millions d’Ukrainiens supplémentaires sous le seuil de pauvreté, aggravant ainsi une crise sociale latente.
Le gouvernement ukrainien, déjà confronté à la lassitude de la population face à la guerre, craint un effet politique explosif, alors que les discussions sur une éventuelle réforme électorale refont surface.
Une monnaie symbole de souveraineté
Au-delà des aspects économiques, la question de la dévaluation revêt une dimension symbolique.
Depuis le début du conflit, la défense du hryvnia a été perçue comme un geste de résistance nationale, une affirmation de la souveraineté ukrainienne face à la Russie.
Abandonner sa parité actuelle serait donc interprété par une partie de l’opinion publique comme une capitulation économique sous contrainte extérieure.
Mais pour le FMI, le réalisme économique doit primer sur le symbolisme politique.
Les économistes de l’institution rappellent que plusieurs pays en guerre ou post-conflit — de la Géorgie au Liban — ont réussi à stabiliser leur économie grâce à une dévaluation temporaire suivie d’une réforme budgétaire.
Kiev entre deux feux : stabilité politique ou solvabilité économique ?
La décision finale appartiendra à la Banque nationale d’Ukraine, en coordination avec le ministère des Finances et les partenaires internationaux.
Mais le dilemme est clair : préserver la stabilité politique à court terme ou assurer la viabilité économique à long terme.
Une dévaluation pourrait améliorer la compétitivité externe du pays, mais au prix d’un choc social interne dont le gouvernement Zelensky — déjà confronté à une baisse de popularité — pourrait difficilement se relever.
L’Ukraine se trouve ainsi dans une équation à somme nulle :
➡️ suivre les recommandations du FMI pour garantir les prêts futurs ;
➡️ ou refuser la dévaluation au risque de voir les financements Internationaux ralentir.
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