Moscou rêve à nouveau d’Afrique. Depuis quelques années, une expression ressurgit dans les cercles diplomatiques, universitaires et éditorialistes les plus affûtés : la Russafrique. Un mot-valise piqué à la France pour décrire cette étrange reconquête russe sur le continent africain. Avec des méthodes anciennes, des ambitions renouvelées et un discours soigneusement emballé dans l’anti-impérialisme de circonstance.
Si la présence russe en Afrique ne date pas d’hier — on se souvient du soutien de l’URSS aux mouvements marxistes de décolonisation —, elle s’est aujourd’hui transformée en une stratégie hybride, mêlant influence politique, soutien militaire, désinformation et extraction minière. Moins coloniale qu’opportuniste, plus tactique qu’idéologique. La Russie ne cherche pas à dominer l’Afrique comme autrefois les puissances européennes, mais à y planter des jalons là où l’Occident recule ou doute.
Pourquoi l’Afrique ? Parce qu’elle est aujourd’hui le théâtre d’un grand réajustement mondial. Le continent regorge de matières premières, de gouvernements instables, de populations jeunes et de conflits gelés : tout ce que Vladimir Poutine sait manipuler. Dans les coulisses de Moscou, l’Afrique est perçue comme un espace où l’on peut encore défier l’Occident à moindre coût, construire une image de puissance globale, et verrouiller des alliances alternatives dans un monde multipolaire.
Wagner, l’armée privée devenue bras armé officieux du Kremlin, s’est imposée comme un acteur majeur dans cette dynamique. Présente en Centrafrique, au Mali, au Soudan ou encore en Libye, elle offre aux régimes fragiles protection et propagande contre concessions minières et silence complice. Une géopolitique du troc, brutale et efficace.
Mais derrière cette façade de retour impérial, certains analystes s’interrogent : la Russafrique est-elle vraiment une stratégie cohérente ou une opération de communication bien huilée ? Le Kremlin peut-il durablement rivaliser avec la Chine, déjà bien implantée, ou même l’Occident malgré sa perte de vitesse ? À Paris comme à Washington, les chancelleries s’inquiètent, mais peinent à proposer une alternative crédible.
Pendant ce temps, dans les cercles intellectuels de Dakar, d’Abidjan ou de Bamako, une nouvelle génération de penseurs africains observe cette valse des puissances avec une distance amusée. Car la véritable question n’est peut-être pas : Que veut la Russie en Afrique ? Mais plutôt : Pourquoi l’Afrique devrait-elle encore servir d’échiquier aux ambitions des autres ?
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