C’était prévisible, presque mécanique : au lendemain des frappes israéliennes sur des infrastructures stratégiques iraniennes, les marchés ont immédiatement réagi, comme mus par une vieille loi de Newton appliquée à la finance globale. En un éclair, le baril s’envole, flirtant avec des niveaux qu’on n’avait plus vus depuis la crise énergétique de 2022.
Le conflit latent entre l’État hébreu et la République islamique d’Iran s’est brusquement mué en confrontation ouverte, et ce regain de tensions géopolitiques, centré sur l’une des régions les plus sensibles de la planète en matière d’hydrocarbures, ne pouvait qu’entraîner une onde de choc sur les marchés de l’énergie.
Les majors pétrolières portées par le brut
TotalEnergies à Paris, ExxonMobil à New York, BP à Londres… Les majors pétrolières ont vu leur capitalisation boursière gagner entre 3 % et 6 % en une seule séance. Les analystes, de Londres à Zurich, saluent une « prime de risque géopolitique » favorable aux groupes disposant de stocks importants ou d’une exposition au gaz naturel liquéfié.
« Dans un monde instable, les actifs fossiles redeviennent des valeurs refuges », analyse avec une pointe de fatalisme un stratégiste chez Lombard Odier. L’inquiétude écologique laisse momentanément place à une réalité plus triviale : la flambée du brut nourrit les marges des géants de l’or noir, surtout ceux capables d’ajuster leur production rapidement.
L’aviation commerciale encaisse le contrechoc
À l’inverse, le ciel s’assombrit pour les compagnies aériennes. Le kérosène représente entre 25 % et 35 % de leurs coûts d’exploitation. Dans un secteur encore convalescent après la pandémie et à peine remis des aléas de la grève des contrôleurs ou de la flambée salariale, cette hausse des prix du carburant agit comme un coup de massue.
Air France-KLM, Lufthansa, mais aussi les compagnies low-cost comme Ryanair ou Wizz Air, ont toutes vu leurs titres reculer en Bourse. « Nous entrons dans une zone de turbulence prolongée », résume un analyste chez HSBC. L’optimisme né de la reprise post-Covid pourrait bien être rattrapé par la réalité des marchés pétroliers.
La guerre, une vieille alliée de la spéculation
En toile de fond, les hedge funds et traders affûtent déjà leurs stratégies, pariant tour à tour sur un baril à 100 dollars ou sur une accalmie rapide. Le pétrole, une fois encore, redevient le thermomètre nerveux d’un monde où la paix est précaire et les équilibres énergétiques fragiles.
Et tandis que le citoyen-consommateur s’inquiète du prix de son billet Paris-New York ou de sa facture de chauffage l’hiver prochain, les salles de marché, elles, rejouent un vieux refrain : quand les bombes tombent, les courbes s’envolent