L’année 2025 devait être celle du rebond. Elle s’annonce morose. Après un pic inattendu de 4,1 % en 2024, la croissance russe s’érode brutalement pour retomber à 1,5 %. Une décélération qui ne s’explique pas uniquement par les sanctions occidentales ou les turbulences du marché de l’énergie. C’est toute une économie qui entre en phase de doute, et avec elle, une myriade d’entreprises russes en quête de souffle.
Le silence glacé des chiffres
Les chiffres, ici, parlent avec une froideur clinique. Les investissements directs étrangers (IDE), considérés comme un baromètre de la confiance économique, ont chuté de 62,8 % sur les douze derniers mois. Un effondrement. Déjà fragilisées par un isolement diplomatique croissant et une défiance généralisée des capitaux étrangers, les entreprises russes doivent désormais composer avec un environnement d’une imprévisibilité quasi politique.
Le Kremlin, loin d’amortir cette chute, semble vouloir en reprendre le contrôle. Lors d’un discours aux allures de doctrine économique, Vladimir Poutine a déclaré que « tout investissement étranger significatif devra désormais recevoir l’aval direct du chef de l’État ». Une phrase qui claque, comme un sceau impérial, mais qui inquiète jusque dans les milieux d’affaires moscovites eux-mêmes.
Une économie dirigée, mais vers quoi ?
Si le président russe entend, selon ses mots, « protéger la souveraineté stratégique des secteurs-clés », ses détracteurs y voient une recentralisation autoritaire de l’économie. « Nous entrons dans une logique d’économie surveillée, où le marché devient secondaire », confie un économiste européen basé à Saint-Pétersbourg, sous couvert d’anonymat. Le message est clair : la Russie ne refuse pas l’argent étranger, mais elle souhaite en choisir la couleur politique.
Les entreprises, elles, se retrouvent piégées entre la prudence des investisseurs et le filtre idéologique du pouvoir. Certaines, comme dans les secteurs de la tech ou de l’agroalimentaire, peinent à se financer, tandis que les géants de l’énergie – Gazprom, Rosneft – restent les rares à pouvoir encore séduire les capitaux chinois ou moyen-orientaux.
L’illusion d’un modèle alternatif
Depuis le début de la guerre en Ukraine, Moscou répète vouloir créer un « écosystème économique alternatif », détaché de l’Occident. Pourtant, l’effondrement des IDE montre bien que les alliances géopolitiques ne remplacent pas la confiance économique. On ne bâtit pas une croissance durable sans prévisibilité, ni sans ouverture.
La volonté présidentielle de valider chaque nouveau projet étranger traduit moins une stratégie de relance qu’un réflexe de contrôle. Dans une Russie qui se ferme, l’économie ne s’autonomise pas, elle s’inquiète.
La Russie cherche des investissements, mais propose l’incertitude comme interlocuteur. Or, les marchés détestent une chose par-dessus tout : l’arbitraire.
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