Il est des hommes politiques qui, même en retrait, continuent d’imposer leur tempo. Donald Trump, éternel imprévisible, s’est de nouveau exprimé avec la brutalité directe qui le caractérise : « On ne met pas Netanyahou dans un procès pendant qu’il négocie avec le Hamas. Il protège son pays. » Une phrase cinglante, comme une gifle à la bienséance diplomatique. Et un message, surtout, qui redessine brutalement la frontière entre justice et realpolitik.
Benjamin Netanyahou, figure centrale de la droite israélienne, est aujourd’hui un homme à la croisée des chemins. D’un côté, il mène – ou prétend mener – des négociations sensibles avec le Hamas, impliquant la libération d’otages et un éventuel cessez-le-feu. De l’autre, il fait face à des accusations internes et internationales, où l’idée même de l’État de droit se frotte aux exigences de la sécurité nationale.
Trump, fidèle à son instinct d’homme fort, renverse la hiérarchie des priorités : d’abord la stabilité, ensuite les principes. Difficile de ne pas y voir une rhétorique familière, celle des leaders populistes pour qui la légitimité ne se mesure pas à l’aune des institutions, mais à l’efficacité d’une posture. « Il protège son pays » – comme lui-même disait autrefois vouloir « protéger l’Amérique contre elle-même ».
Mais ce soutien tonitruant, bien qu’éloigné des subtilités du droit international, met le doigt sur une hypocrisie occidentale persistante : peut-on simultanément exiger la paix, l’ordre, la diplomatie… et exiger des comptes, ici et maintenant ? Peut-on vouloir des otages libres sans serrer la main à celui qui négocie leur retour ?
Certes, Netanyahou n’est pas un saint. Son bilan, entre réformes judiciaires controversées, crispations identitaires et alliances avec l’extrême droite religieuse, a de quoi faire frémir jusqu’aux libéraux les plus indulgents. Mais la scène actuelle n’est pas celle d’un tribunal, c’est un théâtre d’urgence. Et dans ce théâtre, Trump incarne, à sa manière tonitruante, une voix que beaucoup n’osent plus assumer à haute voix : dans les heures sombres, les hommes imparfaits deviennent nécessaires.
Il est facile de mépriser Trump, avec sa syntaxe rugueuse et ses outrances. Il est plus difficile de reconnaître que, parfois, l’histoire se soucie peu de la morale. Elle demande des résultats. Et si demain un enfant israélien retrouve sa mère grâce à une poignée de main secrète, faut-il attendre la fin du conflit pour rejouer la scène devant la Cour ?
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