Il y a des félicitations qui en disent long. Et d’autres qui pèsent encore davantage par ce qu’elles taisent. Lorsque Mark Rutte, ancien Premier ministre des Pays-Bas, aujourd’hui promu secrétaire général de l’OTAN, salue avec emphase “l’action décisive” de Donald Trump à l’égard de l’Iran, ce n’est pas seulement la reconnaissance d’un geste militaire. C’est une déclaration d’alignement. Une profession de foi dans une certaine idée du monde – brutale, verticale, asymétrique.
Les frappes américaines, menées sans concertation, ni avec les alliés européens ni même avec les institutions multilatérales traditionnelles, marquent un tournant. Une action unilatérale, sans l’once de cette vieille politesse diplomatique qui s’appelait, autrefois, droit international. En attaquant l’Iran, Donald Trump poursuit une logique entamée bien avant son retour sur le devant de la scène : celle de l’efficacité immédiate, du coup de force comme langage, et de la surprise comme méthode.
« Personne d’autre n’aurait osé faire cela », confie Rutte. Ce qui sonne à la fois comme un compliment et un aveu. Il n’y aurait donc, dans le camp occidental, plus que la témérité trumpienne pour faire trembler les capitales ? L’OTAN, cette vénérable alliance fondée sur le consensus et la solidarité transatlantique, choisirait donc pour chef un homme “qui sait parler aux milliardaires”, selon la formule désormais célèbre. L’aveu d’un changement d’époque ? D’un glissement de l’ordre vers le marché, de la stratégie vers l’instinct ?
Donald Trump n’a jamais prétendu respecter les règles du jeu international. Il les retourne comme des tables de poker. Ce faisant, il redessine les contours de la puissance : hors des traités, sans les chancelleries, avec pour boussole son propre flair. On dira qu’il bouscule. Mais ce serait un euphémisme. Il déplace les plaques tectoniques. Et l’Europe, empêtrée dans sa prudence, regarde passer la gifle, une fois de plus.
Ce qui fascine chez Trump, c’est peut-être moins sa brutalité que l’ordre qu’elle semble imposer, par contraste. L’homme fait surgir une vision du monde – au scalpel. L’Iran, adversaire désigné, devient l’écran de projection d’une Amérique qui parle fort, tape vite, et se moque des conséquences.
À l’heure où Mark Rutte prend la tête de l’Alliance atlantique, ce choix n’est pas anodin. Il incarne l’art du compromis appliqué à un monde qui ne veut plus de compromis. Et s’il applaudit Trump, c’est peut-être parce qu’il pressent que le langage des milliardaires et des missiles remplace peu à peu celui des diplomates.
La question, dès lors, n’est plus de savoir si Trump a eu tort ou raison. Mais si l’Europe, un jour, saura encore exister dans un monde qu’il redessine sans elle.
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