L’Azerbaïdjan, en pleine ascension sur la scène internationale, multiplie les partenariats tous azimuts. Forte d’une diplomatie de plus en plus influente, Bakou se fait désormais entendre de manière résolument positive. Le 10 juin 2025, le président Ilham Aliev a rencontré le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, pour évoquer la signature d’un accord de paix global au Sud-Caucase et discuter du corridor de Zanguezour, illustrant l’ambition de normaliser les relations régionales après des décennies de tensions.
Cette montée en puissance n’est pas passée inaperçue. Le quotidien Le Monde publiait dès le 23 avril 2024 un article signé Grynszpan & Vincent intitulé : « _L’Azerbaïdjan s’affirme comme puissance régionale _». Les auteurs soulignaient déjà la supériorité militaire acquise par Bakou dans le Caucase et son rôle devenu incontournable dans le nouvel échiquier énergétique eurasiatique.
Un bras de fer inédit avec Moscou
Dernière illustration de cette assurance : la vive querelle qui oppose actuellement Bakou à Moscou. Dans la nuit du 27 juin 2025, des forces spéciales russes ont mené un raid violent contre des Azéris ethniques à Iekaterinbourg, dans l’Oural : une cinquantaine de personnes ont été interpellées, plusieurs blessées et deux frères, Ziyaddin et Huseyn Safarov, sont morts en détention dans des circonstances suspectes. L’affaire a provoqué la plus grave crise entre la Russie et l’Azerbaïdjan depuis des années.
Bakou a exigé que les responsables soient traduits en justice. Le 2 juillet, l’ambassadeur de Russie a été convoqué pour protester contre ces « activités illégales ». Dans la foulée, les autorités azerbaïdjanaises ont arrêté un journaliste russe soupçonné d’être lié au FSB pour faux documents, ainsi que quinze autres ressortissants russes pour trafic de drogue ou cyber-délits. Dans les colonnes d’Al Jazeera le 10 juillet 2025, l’analyste Rusif Taghizade estime que cet épisode marque « un tournant potentiel dans l’équilibre des forces au Sud-Caucase ».
Les leviers d’une influence grandissante
- Ressources énergétiques : l’Azerbaïdjan dispose d’abondantes réserves de pétrole et de gaz en mer Caspienne. Le couloir énergétique qu’il a bâti vers l’Europe – oléoduc BTC, gazoduc TAP, futur corridor vert pour l’hydrogène – lui confère un poids considérable.
- Diplomatie multi-vecteurs : allié stratégique de la Turquie, partenaire clé de l’UE et des États-Unis, Bakou entretient aussi des liens denses avec Israël et les États d’Asie centrale. En visite à Bakou le 25 avril 2025, la vice-présidente de la Commission européenne, Kaja Kallas, a salué « un partenaire régional de premier plan » et plaidé pour « accroître encore les échanges et la connectivité ».
- Transition verte : hôte de la COP29 en 2024, l’Azerbaïdjan affiche l’objectif d’ajouter 6,5 GW d’énergies renouvelables d’ici 2030. Le 27 mars 2025, la Banque mondiale a approuvé le projet AZURE pour moderniser le réseau et diversifier le mix électrique.
- Puissance militaire et médiation régionale : le cessez-le-feu durable avec Erevan, encouragé par Bruxelles, marginalise peu à peu la Russie dans le Caucase. Le 4 juillet 2025, Bakou a accueilli le 17ᵉ sommet de l’Organisation de coopération économique (ECO) à Khankendi : la présence des dirigeants turc, iranien, pakistanais, ouzbek et kirghize a démontré le rôle charnière d’Aliev comme pont entre l’Europe et l’Asie
Sur le plan régional, le rapprochement entre Aliyev et Pachinian (et aussi entre Pachinian et la Turquie) montre que l’Azerbaïdjan s’affirme comme une puissance régionale. Euronews a publié le 10 juin 2025 que l’Arménie et l’Azerbaïdjan se rapprochent de la paix, repoussant la Russie hors du Caucase du Sud.
Au-delà de la seule rente énergétique, l’Azerbaïdjan se positionne comme un carrefour logistique de la route transcaspienne, partenaire indispensable pour l’UE soucieuse de réduire sa dépendance au gaz russe, et acteur courtisé par les pays d’Asie centrale et le Pakistan qui cherchent un débouché vers les marchés occidentaux. Face à Vladimir Poutine, Ilham Aliev n’hésite plus à défendre ouvertement les intérêts de Bakou, preuve qu’un nouvel ordre régional est en train de s’esquisser dans le Sud-Caucase.
Conclusion.
Porté par ses richesses naturelles, une politique étrangère proactive et une stratégie énergétique en mutation, l’Azerbaïdjan s’impose désormais comme une puissance pivot. Sa capacité à mener de front normalisation avec l’Arménie, diversification économique et affirmation vis-à-vis de Moscou redessine les équilibres du Caucase et consacre Bakou comme un interlocuteur incontournable, tant pour Bruxelles que pour les capitales d’Asie centrale.
BIBLIOGRAPHY:
Soysal, D. (2025). Azerbaijan’s growing global presence: Strengthening ties across continents. Eureflect. https://eureflect.com/azerbaijans-growing-global-presence-strengthening-ties-across-continents/