Il s’appelait Mohammad Shayesteh. Il avait, selon les autorités iraniennes, pactisé avec l’ennemi. L’homme, présenté comme un espion au service du Mossad, a été pendu à l’aube dans une prison de la province d’Ispahan. Une exécution de plus, dans un pays où la sentence de mort ne se discute pas — elle s’applique.
La République islamique d’Iran, fidèle à une tradition judiciaire aussi opaque qu’implacable, justifie son geste au nom de la souveraineté et de la sécurité nationale. L’accusé, disent-ils, aurait transmis des informations sensibles à l’État hébreu. Aucun procès public, peu de preuves communiquées, et une condamnation expédiée comme on règle un contentieux d’État.
Une justice ou une vengeance d’État ?
La question dépasse le cas Shayesteh. Elle touche au cœur même du fonctionnement d’un régime qui, depuis 1979, mêle religieux et politique, idéologie et répression. En Iran, les procès pour espionnage — souvent liés à Israël, aux États-Unis ou au Royaume-Uni — relèvent davantage de la dramaturgie révolutionnaire que du droit tel que le conçoit la tradition occidentale.
La peine de mort, elle, n’est pas l’exception mais la norme. Selon Amnesty International, l’Iran est, après la Chine, le pays qui exécute le plus. En 2024, on comptait plus de 800 pendaisons, dont certaines pour des motifs aussi flous qu’« inimitié envers Dieu » — accusation fourre-tout qui permet de balayer activistes, journalistes et « traîtres » réels ou supposés.
Le silence prudent de la communauté internationale
Si certaines chancelleries — Berlin, Paris, Ottawa — ont dénoncé l’exécution, l’indignation demeure feutrée. L’Occident, qui n’est pas toujours exempt de duplicité, compose avec Téhéran selon ses intérêts énergétiques ou stratégiques. Dans les couloirs feutrés des Nations Unies, on évoque certes les « standards de justice inacceptables », mais les protestations restent sans suite. La realpolitik ne s’embarrasse guère de principes lorsqu’il s’agit d’équilibres régionaux.
Y a-t-il de « bons motifs » pour tuer ?
La question, terrifiante dans sa simplicité, plane. Un État peut-il invoquer la sécurité nationale pour éliminer ses opposants, réels ou imaginés ? L’histoire abonde de régimes qui, au nom de l’intérêt supérieur, ont érigé la mort en procédure. Mais lorsque la justice devient vengeance, le droit cède sa place à la peur.
En Iran, chaque pendaison est un message : l’État regarde, l’État sait, l’État peut. Et dans ce climat où la corde remplace le dialogue, c’est tout un peuple qui vit sous l’ombre longue d’un pouvoir qui préfère les potences aux procédures
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