C’est une scène à la fois rituelle et soigneusement chorégraphiée : Ali Khamenei, silhouette noire, regard froid, pose sa voix sur le destin du monde. Cette semaine, l’ayatollah suprême iranien a affirmé que les installations nucléaires de son pays étaient « en excellent état », quelques jours à peine après l’annonce d’un cessez-le-feu fragile entre Israël et les factions pro-iraniennes opérant dans la région. Et d’ajouter, dans un souffle presque triomphant : une gifle a été administrée aux États-Unis.
Depuis Téhéran, la rhétorique n’a jamais été affaire de nuances. Mais ici, il s’agit d’un art stratégique, patient, millimétré. Tandis que les chancelleries occidentales saluent à demi-mot une accalmie entre Israël et ses voisins hostiles, la République islamique d’Iran revendique, elle, une victoire totale : politique, militaire, symbolique. Et nucléaire.
L’affirmation publique de la bonne santé du programme nucléaire iranien n’est pas un simple point technique : c’est un message codé. Non pas seulement à Washington ou à Tel-Aviv, mais au monde arabe, à l’Asie, et à l’intérieur même de l’Iran. Cela signifie : nous avons tenu bon, nous n’avons pas cédé, nous avons gagné du temps — et peut-être gagné tout court. C’est une manière d’imposer un récit, dans une guerre où la perception compte autant que les faits.
Côté occidental, on s’inquiète, mais sans trop hausser le ton. Washington, empêtré dans un calendrier électoral vénéneux, a peu d’appétit pour une nouvelle escalade. Israël, sous pression internationale, doit composer avec un cessez-le-feu qui ne dit pas s’il est paix ou simple pause. L’Europe, comme souvent, oscille entre la prudence diplomatique et l’aphasie stratégique.
Mais pour Téhéran, le moment est propice. Le régime a survécu aux sanctions, aux soulèvements populaires, à l’assassinat de ses hauts gradés, aux cyberattaques et aux isolations successives. Il s’offre même le luxe d’un retour au centre du jeu diplomatique, alors que les États-Unis semblent vouloir tourner la page des aventures interventionnistes. Khamenei le sait : dans un monde en transition, l’ambiguïté est une force.
Reste la question centrale : cette posture iranienne est-elle simplement rhétorique ou le prélude à une nouvelle phase d’affirmation ? Si le nucléaire iranien est réellement en “bon état”, comme l’assure le Guide, alors ce n’est pas seulement une gifle. C’est un avertissement. Et peut-être, pour le monde occidental, le rappel cruel d’une perte d’influence.
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