Alors que Kiev rouvre la porte au dialogue et que Moscou se dit prêt à la paix — à ses conditions —, une séquence diplomatique trouble s’ouvre sur la fin de l’année 2025. Entre posture et realpolitik, le retour des négociations interroge plus qu’il ne rassure.
L’annonce est tombée comme un murmure en sourdine, presque discrète, presque gênée : Kiev, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, s’est dite « ouverte à de nouveaux dialogues » avec Moscou. De son côté, le Kremlin réaffirme vouloir « la paix », mais selon des termes qui ressemblent davantage à une reddition maquillée qu’à une concession équitable. Dans cette reprise des pourparlers, chacun parle de paix, mais rêve d’une victoire.
Après trois années de guerre exténuante, le retour d’un langage diplomatique entre la Russie et l’Ukraine ne peut être balayé d’un revers de main. Pourtant, les observateurs les plus aguerris savent qu’à Moscou, chaque mot pèse son poids de stratégie, et qu’à Kiev, chaque ouverture comporte un risque politique quasi existentiel.
Moscou parle de paix, mais sur ses lignes
Le vice-ministre russe des Affaires étrangères, dans une interview accordée à un média d’État, a souligné que « la Fédération de Russie reste favorable à une solution pacifique », tout en exigeant — sans détour — la reconnaissance de ses annexions territoriales, la neutralité militaire de l’Ukraine et la levée des sanctions internationales. En somme : une paix qui entérinerait les fruits du conflit, avec la bénédiction tacite de la communauté internationale.
Ce que Moscou appelle « paix » relève ici d’un lexique orwellien : c’est la guerre, mais figée. Le fait accompli sanctuarisé par la diplomatie. Comme souvent dans l’histoire russe, le temps long se conjugue avec la patience géopolitique : faire la paix pour mieux figer un rapport de force asymétrique.
L’Ukraine, entre fatigue et clairvoyance
Du côté de Kiev, l’ouverture à de nouveaux pourparlers semble moins être un revirement idéologique qu’un signe d’essoufflement stratégique. La contre-offensive de l’été n’a pas renversé le cours de la guerre ; l’aide occidentale, bien que toujours présente, s’essouffle politiquement ; et la société ukrainienne elle-même, héroïque mais éprouvée, réclame une perspective — même floue — de sortie.
Volodymyr Zelensky, dont le charisme martial avait galvanisé la résistance, doit désormais composer avec une arithmétique politique plus cruelle : celle de la durée, de la démographie, des hivers sans fin. En rouvrant la voie au dialogue, il ne capitule pas ; il temporise. Et dans la tradition byzantine de la diplomatie slave, cela peut suffire à rebattre les cartes.
Une paix introuvable ou un gel du conflit ?
La question qui se pose, à l’orée de la fin de cette année 2025, est moins celle de la paix que de son simulacre. Les conditions posées par Moscou sont inacceptables pour Kiev ; les exigences ukrainiennes — retrait des troupes russes, retour aux frontières de 1991 — sont irrecevables pour le Kremlin. Alors, que négocie-t-on vraiment ? Un gel du conflit ? Une trêve hypocrite ? Un compromis bâtard que chacun pourra vendre comme une victoire domestique ?
L’histoire contemporaine regorge de ces paix sans paix : Corée, Abkhazie, Chypre, Transnistrie. Des blessures ouvertes maquées en lignes de cessez-le-feu. Et si l’Ukraine, à son corps défendant, s’ajoutait à cette cartographie de l’inachevé ?
L’Europe en spectatrice désabusée
L’autre spectre de cette séquence est celui de l’Europe, à la fois voisine inquiète et spectatrice impuissante. Entre les échéances électorales et les replis nationaux, le vieux continent peine à incarner une voix unique sur le dossier. Paris, Berlin, Rome, Bruxelles : toutes les capitales veulent la paix, aucune ne veut l’arbitrer.
Dans ce vide, la Russie avance ses pions. L’Ukraine, elle, lutte pour ne pas perdre la main. Et les diplomates s’apprêtent à rejouer une vieille pièce : celle des négociations en trompe-l’œil, où le langage feint la réconciliation, pendant que la réalité s’endurcit.
Vers une fin d’année sous le signe de l’ambiguïté
Alors que s’achève 2025, ces prémices de dialogue ne sont ni une percée ni un mirage. Ils forment un clair-obscur diplomatique, où chaque mot est une manœuvre et chaque silence, un calcul. L’idée de paix, brandie comme une bannière, masque encore la guerre des intentions.
Car dans cette histoire, la paix ne sera jamais donnée. Elle sera, si elle advient, arrachée. Et peut-être pas avant longtemps.
Résumé :
Alors que Kiev se dit ouverte à de nouveaux pourparlers et que Moscou se déclare prêt à la paix — mais sous conditions —, la diplomatie russo-ukrainienne entre dans une zone grise. Aucun des deux camps ne semble prêt à céder sur l’essentiel, et la perspective d’une paix véritable reste incertaine. Fin 2025 s’annonce non pas comme un tournant, mais comme un moment suspendu, entre lassitude stratégique, jeu d’apparences et peur d’un enlisement durable.
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