À Antananarivo, la capitale de Madagascar, le colonel Michaël Randrianirina a prêté serment vendredi à la Haute Cour constitutionnelle, marquant une rupture politique majeure dans l’histoire récente de l’île rouge. La chute de l’ex-président Andry Rajoelina, contraint à l’exil après trois semaines de manifestations, ouvre une période de transition où l’armée, paradoxalement actrice et garante d’un nouvel ordre, s’installe au cœur du pouvoir.
Chef du CAPSAT, une unité d’élite qui s’est récemment mutinée pour rejoindre les manifestants antigouvernementaux, Randrianirina incarne cette figure hybride de militaire et de réformateur inattendu. Dans les rues d’Antananarivo, entre drapeaux froissés et affiches déchirées, certains voient en lui l’homme capable de redonner souffle et cohérence à une nation marquée par des années d’instabilité politique et de précarité économique. D’autres, plus sceptiques, redoutent un exécutif aux mains trop fermes, où la promesse démocratique se heurte au pragmatisme militaire.
Lors de son investiture, Randrianirina a annoncé la création d’un comité militaire transitoire, chargé de préparer le terrain pour des élections dans les deux prochaines années. Son discours, à la tonalité à la fois solennelle et mesurée, oscillait entre affirmation d’autorité et appel à l’unité nationale : une rhétorique qui semble vouloir conjuguer ordre et modernité, rigueur et ouverture.
La communauté internationale, quant à elle, observe avec prudence cette mutation du pouvoir. L’Union africaine a suspendu Madagascar, et l’ONU dénonce ce changement de régime comme anticonstitutionnel, rappelant que l’équilibre entre légitimité populaire et gouvernance militaire reste un fil fragile sur lequel toute la nation danse.
Pour Madagascar, l’heure est à la réflexion. Entre promesses de renouveau et inquiétudes légitimes sur la durée d’une gouvernance militaire, le pays entre dans une phase où le courage politique sera autant dans l’audace de la réforme que dans la retenue des ambitions. Et dans les cafés d’Antananarivo, parmi les artistes et intellectuels qui scrutent le nouveau visage de leur pays, se murmure déjà la question : cette mutation est-elle le prélude d’une renaissance ou simplement un interlude historique parmi d’autres ?
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