Selon une révélation du Washington Post, Washington réfléchirait à un plan radical pour l’après-guerre à Gaza : le déplacement de l’ensemble de la population palestinienne et la mise sous administration américaine du territoire pour une durée de dix ans, le temps d’y bâtir un « hub » touristique et technologique. L’annonce, qui ressemble à un projet de laboratoire géopolitique, s’inscrit dans la longue tradition des visions américaines où le réel se dissout dans l’ingénierie stratégique.
Mais l’ampleur de la proposition interroge : comment parler de paix lorsqu’elle passe par l’exil contraint de deux millions d’habitants ? Comment prétendre reconstruire une terre sans ses habitants, en réduisant Gaza à un « espace » prêt à l’investissement étranger ? Derrière l’imaginaire high-tech et balnéaire, c’est la question de la dépossession qui s’impose : un territoire vidé de ses voix, remodelé pour l’œil extérieur, mais privé de son âme.
On devine ici la logique de puissance américaine, entre pragmatisme géostratégique et idéalisme proclamé : transformer un champ de ruines en vitrine du XXIᵉ siècle, quitte à ignorer la mémoire et l’attachement des peuples. Gaza ne serait plus Gaza, mais un décor mondialisé, un Las Vegas oriental où les cicatrices seraient maquillées par le béton neuf et les câbles de fibre optique.
Ce projet, s’il venait à se concrétiser, poserait une question vertigineuse : peut-on vraiment pacifier une terre en effaçant ceux qui l’habitent ? À vouloir construire une utopie sur une table rase, l’Amérique prend le risque d’écrire un chapitre supplémentaire de la tragédie orientale, où la paix se confond avec l’effacement.
Avez-vous trouvé cet article instructif ? Abonnez-vous à la newsletter de notre média EurasiaFocus pour ne rien manquer et recevoir des informations exclusives réservées à nos abonnés : https://bit.ly/3HPHzN6
Did you find this article insightful? Subscribe to the EurasiaFocus newsletter so you never miss out and get access to exclusive insights reserved for our subscribers: https://bit.ly/3HPHzN6