Il y a ceux qui méditent, ceux qui courent au lever du jour, et ceux – plus discrets – qui rient. Un éclat discret dans le métro, un fou rire entre amis, un rire nerveux à la machine à café. Simple réflexe social ? Défense psychique ? Ou geste thérapeutique ? Dans un monde saturé d’anxiolytiques, d’applis de respiration et de podcasts sur le lâcher-prise, le rire fait figure d’acte archaïque et subversif – une forme de joie non monétisable.
Mais au-delà du charme de l’instant, le rire est-il réellement bon pour la santé ? Ou est-ce là une de ces vérités douces qu’on aime se répéter sans jamais les interroger ?
Une gymnastique intérieure
Sur le plan physiologique, la réponse est sans équivoque : oui, rire est bon pour le corps. Depuis les travaux pionniers de William Fry à Stanford dans les années 1960, de nombreuses études ont montré que le rire active les muscles abdominaux, fait baisser le cortisol (l’hormone du stress), stimule le système immunitaire, et provoque une petite décharge d’endorphines, ces opioïdes naturels qui nous rendent euphoriques sans ordonnance.
Une minute de rire équivaudrait à dix minutes de rameur léger, affirmait même une étude un peu enthousiaste publiée dans The International Journal of Obesity. Ce n’est pas une raison pour annuler sa séance de pilates, mais tout de même.
Une médecine de l’âme, surtout
Mais le vrai bénéfice du rire est peut-être ailleurs. Il est ce que le philosophe Henri Bergson appelait une anesthésie momentanée du cœur – non pas une fuite, mais une suspension du tragique. Dans les hôpitaux, des associations de clowns apportent une forme de légèreté vitale aux enfants hospitalisés. En gériatrie, le rire stimule la mémoire, relance le lien social, et diminue l’anxiété.
La psychologie positive, dans sa quête de preuves scientifiques du bonheur, a même tenté de mesurer les effets du rire sur la résilience psychologique. Résultat : les patients qui rient plus fréquemment feraient preuve d’une meilleure capacité d’adaptation face aux chocs émotionnels.
Une pratique de résistance
Dans une époque saturée de gravité – entre crises sanitaires, tensions géopolitiques et inflation chronique – rire peut sembler indécent. Et pourtant, rire est peut-être l’acte le plus politique qu’il nous reste. Il est une manière de déjouer la peur, de désamorcer la violence, voire de survivre au quotidien.
Le rire, dès lors qu’il ne se fait pas moquerie cynique, devient une ressource commune, un bien immatériel qui ne coûte rien mais enrichit tout. Il est ce que les anciens Grecs appelaient euphrosyné : la joie partagée, fragile mais essentielle à la cité.
Conclusion : une hygiène mentale à cultiver
Alors oui, rire est bon pour la santé – du corps, de l’esprit et du lien. Il ne guérit pas tout, bien sûr. Mais il soigne ce qui ne se prescrit pas : la solitude, l’angoisse, la lourdeur de l’époque. Et dans ce monde si sérieux, où tout est rentabilité, sécurité, performance… un bon éclat de rire vaut parfois tous les coachs de vie.
Avez-vous trouvé cet article instructif ? Abonnez-vous à la newsletter de notre média EurasiaFocus pour ne rien manquer et recevoir des informations exclusives réservées à nos abonnés : https://bit.ly/3HPHzN6
Did you find this article insightful? Subscribe to the EurasiaFocus newsletter so you never miss out and get access to exclusive insights reserved for our subscribers: https://bit.ly/3HPHzN6