Elle est là, toujours là. Mais sans jamais y être tout à fait. Dans la guerre en Ukraine, dans les tensions autour d’Israël, dans les frictions entre l’Iran et l’Occident, la Chine est l’absente omniprésente. Grande puissance sans fusil, empire sans invasion, Pékin cultive l’ambiguïté stratégique comme d’autres collectionnent les alliances. Une discrétion qui fascine autant qu’elle inquiète. Pourquoi, dès lors, la Chine n’intervient-elle pas ?
La réponse tient sans doute à une philosophie du pouvoir radicalement différente de celle des puissances occidentales. Là où Washington frappe, Moscou avance, Téhéran complote et Jérusalem réplique, Pékin patiente. L’idéologie du Parti communiste chinois n’a jamais été celle de l’ingérence armée, mais celle de la domination silencieuse, du temps long et du calcul permanent. La Chine ne cache pas son ambition d’être la première puissance mondiale. Elle cache simplement les moyens par lesquels elle y parviendra.
À l’heure où l’Occident s’épuise dans des guerres de position ou des soutiens diplomatiques à flux tendus, la Chine capitalise sur la fatigue des autres. Elle vend, elle prête, elle construit. Ses armes sont économiques, technologiques, logistiques. La Belt and Road Initiative (les nouvelles routes de la soie) a davantage redessiné le monde que n’importe quel conflit armé.
Concernant l’Ukraine, Pékin joue sur un fil : elle ne condamne pas l’invasion russe, mais n’y prend pas part. Elle se présente comme médiatrice, tout en renforçant discrètement ses liens avec Moscou. Face à Israël et l’Iran, la Chine adopte une posture de neutralité bienveillante : dialogue avec tous, engagement avec personne. Pas par pacifisme – mais par opportunisme. Moins elle s’implique, plus elle reste indispensable.
Car c’est là le génie discret de la diplomatie chinoise : se rendre incontournable tout en restant insaisissable. En n’entrant dans aucun conflit, elle s’assure de pouvoir parler à tous, commercer avec tous, négocier à tout moment. La Chine n’est pas un arbitre ; elle est un joueur muet, qui ne mise jamais sur la table, mais tient déjà les cartes de demain.
Certains y voient une forme de lâcheté. D’autres, une leçon de réalisme. Dans un monde où la guerre brûle les nerfs et les ressources, Pékin économise les siennes. Elle n’est pas absente des conflits du monde : elle les regarde, les mesure, les intègre à sa stratégie globale. Et pendant que les bombes tombent, elle avance – sans bruit, sans dette, sans héros.
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