Dans un monde financier marqué par des incertitudes croissantes, certaines devises se distinguent comme des remparts contre les crises économiques et géopolitiques. Sur le long terme, trois monnaies ressortent systématiquement pour leur capacité à préserver la valeur des portefeuilles : le franc suisse (CHF), le dollar américain (USD) et, dans une moindre mesure aujourd’hui, le yen japonais (JPY). Chacune de ces devises offre des caractéristiques uniques, adaptées à différents types de chocs, ce qui en fait des instruments incontournables pour les investisseurs cherchant à sécuriser leurs avoirs. Cet article explore les forces et limites de ces devises refuges, leurs dynamiques en 2025, et les stratégies pour les intégrer dans une allocation défensive équilibrée.
Le franc suisse : L’étalon-or des valeurs refuges
Le franc suisse (CHF) est largement reconnu comme la devise refuge par excellence par les professionnels des marchés financiers. Sa solidité repose sur plusieurs piliers : la neutralité politique de la Suisse, des excédents courants chroniques, un endettement public parmi les plus faibles au monde, et un secteur bancaire robuste et bien capitalisé. En 2025, des tensions géopolitiques majeures, notamment les frappes israélo-iraniennes de juin, ont déclenché d’importants afflux de capitaux vers le CHF, propulsant la devise à des niveaux records face au dollar américain. Selon swissinfo.ch, la monnaie helvétique « continue d’être la valeur refuge par excellence », une position renforcée par des analyses de investing.com et ainvest.com. Ces sources soulignent que le CHF surpasse même le yen japonais, offrant une stabilité inégalée pour préserver le pouvoir d’achat sur le long terme. Cette résilience fait du franc suisse le choix privilégié lors de crises géopolitiques ciblées ou de récessions mondiales prolongées.
Le dollar américain : La forteresse de la liquidité
Le dollar américain (USD) demeure la pierre angulaire du système financier mondial, en tant que principale devise de réserve. Plus de la moitié des échanges commerciaux internationaux et 57 % des réserves officielles des banques centrales sont libellés en USD, comme le rapporte econofact.org. La profondeur de son marché et la liquidité exceptionnelle des Bons du Trésor américains en font le refuge privilégié lorsque les investisseurs doivent se repositionner rapidement et en volume face à une montée soudaine de l’aversion au risque. Cependant, la suprématie du dollar est de plus en plus contestée. Les déficits budgétaires et commerciaux persistants des États-Unis, les débats récurrents sur le plafond de la dette, et les incertitudes politiques ont conduit certaines banques centrales à envisager une diversification vers l’euro, le yuan ou l’or, selon reuters.com. Le dollar excelle ainsi comme un « abri de liquidité », mais sa capacité à protéger les portefeuilles dépend de la confiance continue dans la solvabilité des obligations américaines. En cas de volatilité brutale des marchés, le USD reste inégalé pour absorber des flux massifs de capitaux.
Le yen japonais : Un refuge tactique en déclin
Historiquement plébiscité en période d’aversion au risque, le yen japonais (JPY) voit son statut de valeur refuge s’éroder. Les taux d’intérêt maintenus à des niveaux extrêmement bas par la Banque du Japon, combinés à une dette publique parmi les plus élevées au monde, rendent la devise vulnérable aux stratégies de carry trade, où les investisseurs empruntent en yen pour investir dans des actifs à plus haut rendement. Bien que le JPY puisse encore jouer un rôle de « parachute » lors de pics soudains de volatilité, son appréciation est moins durable que celle du franc suisse, comme l’analyse eurasiareview.com. Le yen reste néanmoins pertinent pour des repositionnements tactiques face à un recul des actifs risqués, à condition de gérer activement les risques liés au portage. Sa corrélation négative ponctuelle avec les marchés d’actions peut offrir des opportunités, mais son efficacité est limitée par les contraintes structurelles de l’économie japonaise.
Adapter son choix au type de crise
Le choix de la devise refuge optimale dépend étroitement de la nature du choc économique ou géopolitique :
- Volatilité brutale des marchés : Le dollar américain, grâce à sa liquidité inégalée, est le véhicule idéal pour absorber des flux massifs et rapides de capitaux, offrant une protection immédiate.
- Crises géopolitiques ciblées ou récessions mondiales prolongées : Le franc suisse brille par sa capacité à préserver le capital sur le long terme, en maintenant la valeur réelle des avoirs.
- Repositionnement tactique face à un recul des actifs risqués : Le yen japonais peut servir de couverture temporaire, mais son utilisation nécessite une gestion rigoureuse des risques de portage.
D’autres devises, telles que le dollar de Singapour (SGD) ou la couronne norvégienne (NOK), peuvent offrir un abri sectoriel, grâce à la stabilité politique ou à l’exposition aux matières premières. Cependant, leurs marchés moins profonds limitent leur capacité à rivaliser avec le CHF, l’USD ou le JPY en termes de liquidité et de résilience à grande échelle.
Construire une allocation défensive équilibrée
Plutôt que de s’appuyer sur une seule devise refuge, une stratégie défensive efficace repose sur une diversification judicieuse. Une allocation équilibrée peut combiner les atouts complémentaires des trois principales devises refuges :
- Franc suisse (CHF) : Pour ancrer la préservation du capital à long terme, en particulier face à des crises prolongées.
- Dollar américain (USD) : Pour garantir une liquidité instantanée et absorber les chocs soudains des marchés.
- Yen japonais (JPY) : En complément, pour tirer parti de sa corrélation négative ponctuelle avec les actifs risqués, sous réserve d’une gestion active.
Cette approche réduit la dépendance à un seul émetteur et atténue les risques idiosyncratiques liés à chaque devise. Par exemple, une exposition excessive au dollar pourrait être vulnérable aux incertitudes politiques américaines, tandis qu’une dépendance au yen pourrait être affectée par les dynamiques de carry trade. En diversifiant, les investisseurs peuvent lisser les impacts des turbulences tout en optimisant la résilience de leur portefeuille.
Perspectives pour 2025 et au-delà
En 2025, les incertitudes géopolitiques, les tensions commerciales et les pressions inflationnistes continuent de renforcer l’attrait des devises refuges. Le franc suisse, en particulier, bénéficie d’un regain d’intérêt face aux crises régionales, tandis que le dollar américain reste un pilier pour les investisseurs recherchant une liquidité immédiate. Le yen japonais, bien que moins robuste, conserve une utilité tactique dans des contextes de volatilité extrême. À l’avenir, la montée en puissance de devises alternatives, comme le yuan, ou le retour de l’or comme actif refuge pourraient redessiner les dynamiques traditionnelles. Toutefois, pour l’heure, le CHF, l’USD et le JPY demeurent les piliers d’une stratégie défensive.
En conclusion, dans un environnement financier marqué par l’instabilité, les devises refuges restent des outils indispensables pour protéger le capital et naviguer les crises. En combinant stratégiquement le franc suisse, le dollar américain et, de manière sélective, le yen japonais, les investisseurs peuvent construire une allocation robuste, capable de résister aux tempêtes tout en préservant la valeur de leurs portefeuilles. Une gestion proactive et une diversification réfléchie sont essentielles pour tirer le meilleur parti de ces actifs dans un monde en constante évolution.