C’est à Ahmedabad, dans le nord de l’Inde, que le drame s’est noué hier à l’aube. Un Boeing 787 d’Air India, en décollage , s’est écrasé à quelques kilomètres de la piste, causant la mort de 265 personnes dont un survivant selon un bilan provisoire. L’avion, fleuron de l’aéronautique moderne, conçu pour incarner la nouvelle génération du vol long-courrier — économe, ultra-connecté, semi-intelligent — s’est transformé en cercueil volant.
Alors que les secours s’activent et que les boîtes noires sont en cours d’analyse, une question vertigineuse s’impose : comment un appareil de cette envergure, bijou d’ingénierie du XXIe siècle, peut-il encore tomber du ciel en 2025 ?
L’organisation aérienne mondiale, miroir d’un désordre globalisé ?
L’industrie aéronautique s’est voulue, depuis les années 2000, le laboratoire d’une mondialisation maîtrisée : pièces conçues à Seattle, assemblées en Caroline du Sud, puis réparties entre les usines de Bangalore et Toulouse. Mais cette orchestration complexe, digne d’une symphonie planétaire, laisse parfois entrevoir ses failles.
« On a troqué la centralité du savoir-faire contre la fluidité logistique », souffle un ingénieur aéronautique basé à Hambourg. Entre maintenance externalisée, sous-traitance poussée à l’extrême, et pressions économiques constantes, la chaîne de fiabilité se fragilise.
Le Boeing 787, justement, avait déjà connu des épisodes troublants : batteries défaillantes à son lancement, retards répétés de livraison, puis une série d’alertes sur ses capteurs et ses commandes de vol.
Un avion intelligent, mais un pilotage sous tension
Le 787 est supposé être l’un des avions les plus sûrs au monde. Il embarque plus de 6 millions de lignes de code, une automatisation poussée, une gestion du vol assistée par intelligence embarquée. Mais derrière ces algorithmes, il y a toujours des humains. Et dans certaines régions du monde, le rapport à la formation des pilotes, à la régulation des compagnies ou à l’entretien des appareils ne suit pas nécessairement la même rigueur qu’en Europe ou aux États-Unis.
Il ne s’agit pas ici d’orientaliser la faute, mais de constater que la promesse du ciel mondialisé — un standard universel de sécurité — peine encore à se réaliser partout.
Quand la technique échoue, que nous reste-t-il ?
Chaque crash est une fissure dans l’imaginaire moderne. L’avion, symbole du progrès, de la vitesse et de la rationalité, devient soudain la preuve tangible de notre fragilité. Derrière le mythe technologique, il y a des choix industriels, des arbitrages financiers, des compromis humains.
L’avion qui reliait l’Inde à Londres : il devait nous faire rêver, réconcilier l’homme avec les grandes distances, rendre le voyage presque poétique. On pense à cette famille qui venait de tout quitter pour rejoindre Londres. Mais hier matin, dans la poussière du Gujarat, ce rêve s’est brisé.
Et si c’était moins la machine qui avait failli… que le système qui la porte ?