L’Amérique des profondeurs n’en finit pas de produire ses monstres. À 33 ans, Justin Mohn, ancien bibliothécaire devenu complotiste radical, comparaît cette semaine devant la justice de Pennsylvanie pour l’un des crimes les plus sordides de ces dernières années : le meurtre de son propre père, un employé fédéral, froidement décapité en janvier 2024.
Le crime, au-delà de son horreur brute, résonne comme une parabole noire de l’Amérique contemporaine. Un pays fracturé, où les discours conspirationnistes en ligne se métastasent dans les esprits jusqu’à l’irreversible. Justin Mohn, isolé depuis plusieurs mois, avait sombré dans une rhétorique paranoïaque mêlant anti-étatisme, messianisme armé et théories apocalyptiques. Des fragments d’Internet devenus liturgie personnelle.
Mais l’affaire dépasse le simple fait divers. Après avoir tué son père, Mohn aurait filmé la scène macabre dans une vidéo de quatorze minutes, diffusée sur YouTube avant d’être promptement supprimée. On l’y verrait exhibant la tête de la victime, tout en déclamant un discours incohérent mêlant citations bibliques, appel au soulèvement et insultes contre le « gouvernement profond ». Une mise en scène de l’horreur, pensée comme un manifeste.
Le parquet, qui le poursuit pour meurtre, maltraitance de cadavre et crimes liés au terrorisme intérieur, dépeint un homme radicalisé, « à la croisée du fanatisme personnel et de l’ultraviolence politique ». Selon des sources proches du dossier, la victime — son propre père — aurait travaillé pour une agence fédérale dont le nom reste à ce jour tenu secret.
Dans la salle d’audience de Harrisburg, Mohn ne montre ni remords, ni agitation. Silencieux, presque spectral. Il n’a pas plaidé la folie. Il ne s’est pas excusé. Il assume. Comme si son geste, aussi barbare soit-il, relevait d’un devoir intérieur — ou d’un fantasme devenu délire.
Le procès, largement couvert par les médias américains, interroge au-delà du crime : jusqu’où peut mener l’effondrement du lien social, dans une société où le virtuel forge désormais des convictions plus puissantes que les faits ? Où l’État, même paternel, devient cible.
La justice tranchera. Mais l’Amérique, elle, vacille.
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