Le 27 juin 2025, le président américain Donald Trump a annoncé la fin immédiate de toutes les négociations commerciales avec le Canada, intensifiant les tensions entre les deux nations. Cette décision, publiée sur Truth Social, fait suite à l’instauration par le Canada d’une taxe de 3 % sur les services numériques (DST) visant les grandes entreprises technologiques, majoritairement américaines. Ce coup d’arrêt menace les relations économiques entre les États-Unis et leur deuxième partenaire commercial, laissant planer la menace de nouveaux tarifs douaniers.
Contexte : Une relation commerciale sous tension
Les États-Unis et le Canada entretiennent une relation commerciale étroite, avec des importations canadiennes de 349,4 milliards de dollars en biens américains et des exportations de 412,7 milliards de dollars vers les États-Unis en 2024, selon le Bureau du recensement américain. Cependant, les tensions se sont accrues depuis le retour de Trump à la Maison Blanche en janvier 2025. Son administration a imposé des tarifs de 50 % sur l’acier et l’aluminium canadiens, de 25 % sur les automobiles et de 25 % sur les biens non conformes à l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC). En réponse, le Canada a riposté avec des tarifs sur 43 milliards de dollars d’exportations américaines, ciblant des produits comme le whisky et les appareils électroménagers.
La DST, adoptée par le Canada en juin 2024 et devant collecter ses premiers paiements le 30 juin 2025, est devenue le dernier point de friction. Cette taxe impose un prélèvement de 3 % sur les revenus des services numériques générés par les utilisateurs canadiens pour les entreprises réalisant plus de 20 millions de dollars CAD au Canada et 1,1 milliard de dollars à l’échelle mondiale. Rétroactive à 2022, elle devrait coûter environ 2 milliards de dollars aux géants technologiques américains comme Amazon, Google et Meta. Trump a qualifié cette mesure de « taxe agressive et directe » contre les entreprises américaines, accusant le Canada de s’inspirer des taxes européennes similaires.
L’annonce : Un arrêt brutal des discussions
Dans son message sur Truth Social, Trump a déclaré : « En raison de cette taxe scandaleuse, nous mettons fin à TOUTES les discussions commerciales avec le Canada, avec effet immédiat. Nous informerons le Canada des tarifs qu’il devra payer pour faire des affaires avec les États-Unis dans les sept prochains jours. » S’exprimant plus tard depuis le Bureau ovale, il a souligné la puissance économique des États-Unis, ajoutant : « Nous avons un pouvoir énorme sur le Canada. Ils ont été insensés de faire cela. »
Cette annonce intervient quelques semaines après un sommet du G7 en Alberta, où Trump et le premier ministre canadien Mark Carney s’étaient engagés à conclure un accord commercial d’ici mi-juillet. Ce revirement soudain remet en question ce calendrier et soulève des inquiétudes quant à de nouvelles perturbations économiques. Le secrétaire au Trésor Scott Bessent a laissé entendre que le représentant américain au Commerce pourrait lancer une enquête sous la Section 301 sur la DST, ouvrant la voie à d’éventuels tarifs supplémentaires.
La réponse du Canada : Une diplomatie mesurée
Le premier ministre Mark Carney, qui n’a pas eu de contact direct avec Trump avant l’annonce, a adopté une posture prudente. « Nous continuerons à mener ces négociations complexes dans l’intérêt des Canadiens », a-t-il déclaré aux journalistes, évitant de mentionner directement la DST. Le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, avait précédemment indiqué que la taxe était négociable dans le cadre de discussions commerciales plus larges, mais Ottawa n’a pas encore proposé de la suspendre.
Les chefs d’entreprise canadiens ont exprimé leur inquiétude tout en prônant la retenue. Goldy Hyder, président du Conseil canadien des affaires, a appelé à suspendre la DST en échange d’un allègement des tarifs américains, qualifiant la décision de Trump de « développement regrettable ». Candace Laing, PDG de la Chambre de commerce du Canada, a relativisé en notant que les « surprises de dernière minute » sont courantes dans les négociations, plaidant pour un espace de dialogue.
Réactions internationales et nationales
L’annonce a suscité des réactions contrastées. Sur X, les utilisateurs canadiens ont exprimé leur frustration, certains se moquant de l’approche diplomatique de Carney, tandis que d’autres déploraient les conséquences économiques. Aux États-Unis, les groupes industriels technologiques, comme l’Association de l’industrie des communications et de l’informatique, ont salué la « réponse décisive » de Trump, estimant que la DST cible injustement les entreprises américaines.
À l’échelle mondiale, cette décision est perçue comme un avertissement aux autres pays appliquant des taxes similaires. Rachel Ziemba, du Center for a New American Security, a suggéré que l’annonce de Trump sert de « tactique d’intimidation » pour l’Union européenne, également en pourparlers avec les États-Unis. À titre de comparaison, le Royaume-Uni a maintenu sa DST sans compromettre un récent accord commercial avec les États-Unis, laissant entrevoir une possible flexibilité.
Impacts économiques et défis
La fin des négociations menace d’aggraver les défis économiques. L’économie canadienne, déjà confrontée à un chômage de 7 %, risque de subir des pressions supplémentaires en cas de nouveaux tarifs. Aux États-Unis, des tarifs plus élevés pourraient augmenter les prix à la consommation, comme l’a averti l’économiste Ernie Tedeschi, qui note que les tarifs de Trump ont porté le taux moyen de taxation des importations à 15,8 %, le plus élevé depuis un siècle.
La DST elle-même est controversée. Bien que le Canada la présente comme un moyen d’assurer une taxation équitable des géants technologiques mondiaux, ses détracteurs, dont le premier ministre de l’Ontario Doug Ford, estiment qu’elle met en péril les emplois en provoquant des représailles américaines. Son caractère rétroactif, en particulier, a suscité la colère des entreprises américaines confrontées à des obligations imprévues.
Perspectives : Vers une résolution ?
L’historique de Trump, qui utilise souvent les menaces tarifaires comme levier, suggère que cette décision pourrait être une tactique de négociation. Son administration a déjà assoupli des délais par le passé, Bessent ayant récemment indiqué une certaine flexibilité au-delà de la pause tarifaire du 9 juillet pour les pays négociant de bonne foi. Cependant, l’avocat commercial canadien Lawrence Herman a mis en garde contre toute concession trop rapide, estimant que l’abandon de la DST affaiblirait la position du Canada dans les futures négociations, y compris la prochaine renégociation de l’AEUMC.
Pour l’instant, les deux parties sont sous pression pour désamorcer la crise. Le Canada pourrait proposer de suspendre la mise en œuvre de la DST, tandis que les États-Unis pourraient retarder de nouveaux tarifs pour préserver le calendrier du G7. La semaine à venir, avec un point culminant autour du 4 juillet, sera cruciale alors que Trump s’apprête à annoncer de nouveaux taux tarifaires.
Conclusion
La décision du président Trump de mettre fin aux négociations commerciales avec le Canada en raison de la taxe sur les services numériques marque un revers majeur dans les relations États-Unis-Canada, menaçant la stabilité économique des deux côtés de la frontière. Alors que le Canada reste attaché au dialogue, la menace imminente de nouveaux tarifs souligne la fragilité de cette relation bilatérale. À l’heure où les négociations sont en suspens, le monde observe si la diplomatie ou l’escalade prédominera dans ce différend commercial à enjeux élevés.
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